
La terre vient
de sécrouler : votre animal votre ami,
votre confident, le compagnon qui était toujours
là pour vous - vient de mourir. Chien, chat, cheval,
oiseau, hamster, furet, peu importe lespèce. Peu
importe lâge.
Tout ce qui compte est le vide
immense qui vient dentrer dans votre vie. Ceci, et
votre chagrin.
La sagesse populaire
voudrait que je consacre cette colonne appelée
« Laprès » - à comment se
sentir mieux. Mais si votre compagnon est mort
depuis quelques heures ou quelques jours seulement, vous
nêtes pas en mesure dimaginer vous sentir
mieux un jour. Vous devez même vous demander comment
vous pourrez survivre. Vous pouvez aussi ne pas vouloir
vous sentir mieux.
Ce vide atroce et éreintant,
pourtant douloureux, peut apparaître comme la
seule chose quil vous reste de votre compagnon, et
peut-être navez-vous pas envie de vous en
débarrasser, du moins pas pour linstant. La seule
pensée « d aller mieux » peut
même vous sembler irrespectueuse. Peut-être avez-vous
le sentiment que vous êtes redevable à votre animal
dune période de chagrin, de peine. Se sentir mieux
peut être synonyme de laisser partir et peut-être
nêtes-vous pas encore prêts.
OK. Le chagrin et le
deuil ne sont pas des sortes de mauvais moments, que
lon peut traverser ou dont on peut guérir le plus
vite possible. En réalité, le chagrin est notre ultime
expression damour, le dernier cadeau que nous ayons
à offrir. Il ne peut pas être expédié. Au lieu de
tenter de passer outre, il vaut mieux trouver des façons
de composer avec, et ceci peut prendre un certain temps.
Ainsi, dans cette première
colonne, je ne vais pas vous dire comment guérir, mais
comment survivre.

Dix façons de tenir le coup...
Quand on se trouve face
à cet immense vide intérieur, il est tentant de
sabandonner à son chagrin. Au même moment,
certains instincts de survie vous poussent à faire
quelque chose pour aller de lavant. Mais
quoi ? Le chagrin rend difficile le fait de penser,
de planifier. Que pouvez-vous faire pour ne pas être
submergé par ce vide ?
Mangez quelque chose.
Vous navez peut-être pas faim, mais il
est important de manger. Le chagrin brûle
beaucoup dénergie et vous avez besoin de
carburant. Mangez ce qui vous fait plaisir
et même si cest une grosse tranche de
gâteau au chocolat, ce nest pas le moment
de penser au régime. Moi, jaime le potage
à la tomate. Ça me rappelle le coin du feu
chaud et confortable, alors que la pluie frappe
mes fenêtres.
Si vous ne vous sentez pas le courage de manger
un repas entier, grignotez. Mangez maintenant que
vous le vouliez ou non.

Pleurez. Pleurez
autant que vous voulez tant que vous en avez
envie. Prenez une journée de congé. Si vous
pouvez vous permettre de pleurer quand vous en
avez besoin pendant une journée, cela rendra les
choses beaucoup plus facile pour affronter le
jour suivant.

Trouvez-vous une
occupation. Cela peut sembler
banal mais se concentrer sur une tâche peut
aider. Trouver un projet à réaliser, une tâche
à accomplir, aide à se concentrer sur le monde
(et le « vous » ) qui existe en
dehors de ce vide. Ce nest pas une
distraction et ça ne va pas faire disparaître
votre chagrin. Cela vous aide simplement à
adapter votre perception des choses et à
reconnaître que bien que le chagrin fait partie
de votre vie, il nenglobe pas la totalité
de votre vie.

Faites le compte des bons
côtés de votre vie. Quand on
perd quelquun que lon aime,
cest difficile de se concentrer sur quelque
chose de positif. Même en de si pénibles
circonstances, le côté positif est que
votre animal nétait pas la seule bonne
chose de votre vie. Rappelez-vous les
bonnes choses quil vous reste en faisant
délibérément linventaire des bonnes
choses qui vous entourent comme votre
famille, vos autres animaux, vos amis, vos
intérêts. Revoyez ces choses mentalement ou
écrivez-les. A nouveau, ceci ne comble pas le
vide mais vous rappelle que derrière ce
vide il y a un monde et que vous en faites
partie.

Pensez à des choses qui
nimpliquent pas votre animal. Il
peut vous sembler que la perte de votre animal
touche tous les aspects de votre vie mais en
réalité elle na pas tout changé.
Pensez aux choses inchangées : les choses
que vous faisiez et aimiez faire sans votre
animal. Quand mon chat est mort dun cancer,
je me suis forcée à me rappeler que « la
perte de mon animal ne mempêche pas de
profiter des longues discussions avec mon
mari. Ça ne mempêche pas
d'écrire. Ça ne mempêche pas de
lire un bon livre. Ça ne mempêche pas de
créer de belles choses. Ça ne mempêche
pas de profiter dune belle ballade sur la
plage. » Concentrez-vous sur ces choses que
votre animal navait pas
« touchées » quand il était vivant,
cela vous permettra de vous rendre compte des
choses qui nont pas été réellement
« touchées » par sa mort.

Caressez quelque chose en
fourrure. Si vous avez un autre
animal, consacrez-lui plus de temps en câlins
même si une partie de vous même pense
que ce nest pas cet animal que vous voulez
caresser. Lui aussi a un pelage, il est chaud, et
il se peut quil soit désorienté et
inquiet en ce moment. Si vous navez pas un
autre animal, envisagez de caresser une peluche.
Malgré la présence de votre époux (se), ce
dont vous avez besoin est de caresser le pelage
dun animal. Pelotonnez-vous dans votre lit
avec une peluche et un coussin chauffant.
Cest beaucoup mieux que dêtre
allongé dans le noir en souhaitant avoir un
pelage à caresser.

Evitez les décisions
irrévocables. Ne prenez aucunes
décisions sur lesquelles vous ne puissiez
revenir. Par exemple si vous ne supportez pas la
vue des jouets de votre compagnon, ne les jetez
pas, éloignez les simplement de votre vue. Dans
une semaine ou un mois peut-être aurez vous
envie de les avoir à nouveau, afin de les mettre
dans un mémorial et vous regretterez alors les
décisions hâtives que lon ne peut
reconsidérer. De même, ne vous précipitez pas
pour acquérir un nouveau compagnon, avant
davoir eu le temps de réfléchir.

Remplacer les images
négatives. Les derniers moments de vie
de votre animal constituent peut-être une image
forte que vous en ayez été témoin ou
pas. Même si cette image submerge les bons
souvenirs, essayez de la remplacer par des choses
plus agréables. Si vous croyez par exemple que
les animaux ont une vie après la mort, essayez
de remplacer limage des
« derniers » instants de votre
compagnon, par celle des moments
« suivants » sa mort. Le moment
où il arrive, indemne et en bonne santé de
lautre côté. Que se passe
til ? Qui
laccueille ? Quest-ce
quil fait ? Emplissez votre esprit de
ce moment.
Si vous ne croyez pas à une vie après la mort,
concentrez-vous sur toutes les choses que vous
avez faites pour votre animal, et qui lui ont
permis davoir une vie merveilleuse.

Soyez honnête avec
vous-même. Vous avez été blessé et
vous souffrez. Vous nêtes pas faible, fou
ou trop sentimental pour ressentir ces émotions.
Même si vous devez présenter « un visage
serein » au reste du monde, nessayez
pas de vous berner en pensant que vous
navez pas autant de peine. Si vous
vous coupiez la main, vous mettre en colère
contre vous parce que vous saignez, ne vous
aiderait pas et perdre votre animal est un
peu comme perdre une partie de vous-même. Vous
souffrirez et la guérison sera longue.

Prenez une décision
pour votre travail de deuil. Vous
avez entendu dire : « le temps
guérit toutes les blessures. » Ceci
nest pas vrai. Le temps ne guérit pas
toutes les blessures physiques (essayez de vous
couper la main et de lignorer par la
suite !) et ne guérit pas non plus toutes
les blessures émotionnelles.
Jai rencontré des personnes dont le
chagrin a perduré pendant des années :
elles sont aussi inquiètes, en colère et
malheureuses à propos de leur perte
quelles étaient le jour où cest
arrivé. Ces personnes ont tendance à être
minées par lamertume, faisant de leur
perte une obsession et non seulement elles
souffrent, mais elles entraînent aussi dans leur
souffrance leur entourage.

Il est normal davoir du chagrin.
Mais cest aussi attrayant. Cest très
tentant de le laisser « prendre le dessus. »
Avant toute chose, réfléchissez à la façon dont vous
vous sentez aujourdhui et demandez-vous si vous
avez envie de vous sentir pareillement dans 6 mois ou un
an. Remarquez que je ne vous demande pas de
décider comment vous voulez vous sentir
aujourdhui. Aujourdhui il est possible que
vous nayez pas grand choix pas plus que si
vous pouviez choisir de ne pas souffrir en étant blessé
physiquement. Dans ce cas, votre décision sur la
façon de gérer votre blessure, serait cruciale sur la
façon de déterminer si dici un an vous seriez
guéri ou estropié.
Cest la même chose avec votre
chagrin. Vous ne pouvez pas contrôler si vous voulez ou
pas en ressentir. Mais vous pouvez décider de laisser ou
non le chagrin vous contrôler. Et ces dix
« moyens de survie » sont une bonne façon de
vous assurer de len empêcher.

Texte de Moira Allen
Copyright © Moira Anderson Allen
Tous droits réservés.
Traduit avec son aimable autorisation
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Traductions
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Laurence Bonnefous-Roustan
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